Le sens de nos pas – Claire NORTON (par Fab)

 Editions Robert Laffont - 477 pages


« Auguste a « son » banc, dans un joli parc du Vésinet. Celui où, tant de fois, il est venu s’asseoir avec Jeanne, son grand amour. Depuis la mort de cette dernière, il continue de venir chaque jour avec leur vieux chien, se souvenir des belles choses… Cet après-midi-là, c’est accablé qu’Auguste s’assied : il vient d’apprendre coup sur coup que sa belle-fille et son fils s’apprêtent à le placer en maison de retraite, et qu’il est atteint d’un mal incurable qui ne lui laisse que quelques mois à vivre.

Échouée à l’autre bout du banc, Philomène, 14 ans, est tout aussi désemparée. Fille unique, elle vient de perdre sa mère dans un accident de voiture et a rompu toute communication avec son père qu’elle accuse de lui cacher la véritable cause de cet accident : un suicide.

Leur seule issue, cet après-midi-là : fuguer. Ficher le camp. Auguste parce qu’il est hors de question qu’il passe le peu de temps qui lui reste enfermé et passif. Philomène parce qu’elle ne pourra pas faire son deuil tant qu’elle n’aura pas résolu le mystère de la mort de sa mère.
Auguste n’a certainement pas besoin que cette gamine paumée s’accroche à ses basques. Pourtant, contre toute attente, la quête que vont entreprendre ensemble le vieil homme et la jeune fille se révélera le plus précieux cadeau que la vie pouvait leur réserver… »

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Merci beaucoup à Babelio et les éditions Robert Laffont pour l'envoi de ce livre dans le cadre d'une opération masse critique privilégiée.

A travers ce roman , Claire NORTON nous emporte dans une double fugue, une rencontre entre un vieil homme au crépuscule de sa vie et une jeune fille à l'aube de la sienne. Ces deux personnages vont apprendre à se connaître et s'apprivoiser au cours de leur périple et de leurs quêtes.

Auguste, magnifique senior, plein d'amour et de tendresse, nostalgique des belles années passées avec sa défunte Jeanne, et Philomène (son phénomène) jeune fille dévastée par la mort brutale de sa mère mais pleine d'audace, de sensibilité et d'humanité, vont nous emporter dans un tourbillon d'émotions et de questionnements.

On partage la peine d'Auguste, sur ce banc, sa solitude dans sa propre maison, sa peur face à la décadence liée à sa maladie, à la souffrance. On est révoltés par l'attitude de sa belle-fille qu'il surnomme « Cruella », qui le traite avec indifférence, le considérant comme un rebut, et l'inaction de son fils Simon qui laisse la distance s'installer entre eux, oubliant leur complicité d'antan.

Philomène quand à elle, doit savoir pourquoi sa mère est morte dans cet accident, c'est vital pour elle de comprendre ce qu'il s'est passé. Pourquoi sa mère était-elle là bas ? Est-ce un suicide ? Allait-elle l'abandonner ? Tant de questions auxquelles il lui faut trouver des réponses pour pouvoir continuer à avancer. Benoît, son père ne peut pas y répondre, elle le sait. Il lui faut donc se débrouiller par elle-même.

Du Vésinet, en passant par Veuves, Amboise, la dune du Pilat et enfin la Suisse, on suit notre duo et les personnages rencontrés en cours de route.

Ces quelques jours vont permettre à Auguste de se sentir encore utile, à Philomène et Benoît de comprendre les circonstances de l'accident et de pouvoir mieux faire leur deuil, à d'autres personnages de recommencer une nouvelle vie. A travers eux, on vit des « premières fois » mais aussi des « dernières » jusqu'à l'ultime, celle d'où on revient pas.

C'est une belle histoire de relations humaines, d'amitié intergénérationnelle. Claire NORTON nous ouvre les yeux sur notre façon de regarder nos aînés. Nous incite à nous poser des questions : « quand on s'occupe d'un parent âgé, lui montre t-on suffisamment qu'on l'aime ? Lui accorde t-on assez de temps ? De tendresse ? Faisons nous en sorte qu'il garde sa dignité ? »

« Accepter de voir vieillir ses parents,

suppose apprendre à les aimer malgré ce qu'ils ne sont plus,

tout en préservant leur illusion de l'être encore ».

Ce roman initie beaucoup de questionnements sur la vie, l'amour, notre relation aux autres. Sur l'entraide aussi, la résilience, la reconstruction après la perte d'un être cher. Comment survivre à la l'absence de l'être aimé quand on se sent seul même au milieu des autres ?

Elle ré-ouvre le débat sur le suicide assisté, l'euthanasie, le choix de mourir dignement et sans souffrir lorsque l'on se sait atteint d'une maladie incurable. Autant de sujets qui divisent et que nos gouvernements ont tendance à mettre « sous le tapis ».

Un roman bouleversant devant les questions de la transmission, du deuil, de la fin de vie, de l'amour, du pardon.




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