Agnès MARTIN-LUGAND - Désolée je suis attendue (par Fab)

Éditions Michel Lafon (378 pages) - Pocket (404 pages)


Yaël ne vit que pour son travail. Brillante interprète pour une agence de renom, elle enchaîne les réunions et les dîners d’affaires sans jamais se laisser le temps de respirer. Les vacances, très peu pour elle, l’adrénaline est son moteur. Juchée sur ses éternels escarpins, elle est crainte de ses collègues, et ne voit quasiment jamais sa famille et ses amis qui s’inquiètent de son attitude. Peu lui importe les reproches qu’on lui adresse, elle a simplement l’impression d’avoir fait un autre choix, animée d’une volonté farouche de réussir.

Mais le monde qu’elle s’est créé pourrait vaciller face aux fantômes du passé.

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Comment passer de Boute-en-train, joyeuse, procrastinatrice professionnelle et allergique au moindre travail à working girl déshumanisée, froide, ambitieuse au possible et vivant exclusivement pour son boulot ? C’est le pari gagné par Yaël !

Moteur de son groupe d’amis qu’elle ne quitte jamais, elle ne pense qu’à faire la fête et rire, jusqu’au jour où Marc disparaît sans prévenir…...

Au départ on la déteste, car elle est détestable. Insupportable. Elle pense que tous les autres ont fait les mauvais choix, sa sœur, ses amis, ses collègues et ne se remet jamais en question. Elle laisse peu à peu tomber tous ceux qui l’aimaient pour ne se consacrer qu’à sa carrière. Elle est odieuse avec tout le personnel de l’agence excepté avec son patron qu’elle vénère et craint. De son groupe d’amis chacun a poursuivi sa vie, mariage, enfants, famille, amitié. En revanche, Yaël est seule. Elle fuit sa famille et n’a plus d’amis, pas le temps pour ces futilités. Elle travaille ! Elle fait des choses importantes, elle ! Les autres ne peuvent pas comprendre …

Aussi, quand le passé la rattrape, elle n’est pas prête. Elle ne sait pas faire. Comment se laisser aller, comment aimer, comment se ménager des petits moments de bonheur sans faiblir professionnellement ? L’armure se fissure, les fragilités apparaissent, les blessures se rouvrent, mais peu à peu elle ré-apprend à vivre et ne se contente plus de survivre. Elle s’ouvre aux autres, se rapproche de sa famille et de ses amis d’enfance. Elle s’humanise et s’épanouit. Mais le combat contre l’ambition et l’égo ne se gagne pas si facilement.

Dans ce roman, Agnès Martin-Lugand nous brosse un portrait un brin caricatural de l'héroïne, mais pose aussi la question de la place de la femme en général dans le monde du travail.
Quels sacrifices doit-elle faire pour réussir sa carrière ?

Vie de famille et vie professionnelle sont elles totalement incompatibles lorsqu’on est une jeune femme ambitieuse ?

La soif de reconnaissance doit-elle aller jusqu’à mettre notre santé en danger ?

Peut-on prendre le risque d’aimer quand on a un poste à responsabilités ?

Je ne vous le cache pas, ce n’est pas un livre à suspense. La première partie m’a paru très longue et répétitive. Cependant, quand Yaël est rattrapée par les fantômes de son passé, le rythme s’accélère et les processus de déconstruction/reconstruction de l’héroïne sont très intéressants et finement amenés. On comprend petit à petit les mécanismes de protection mis en place par Yaël pour continuer à vivre. Les personnages secondaires sont aussi attachants que Yaël est antipathique. Le style de l’auteur est toujours aussi fluide.

J’ai passé un bon moment avec ce roman mais ce n’est pas un coup de cœur comme « Entre mes mains le bonheur se faufile ».

 

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