Laurence PEYRIN – Après l’Océan (par Fab)

Laurence PEYRIN – Après l’Océan

Calmann-Lévy (486 pages)


En avril 1912, Letta et Molly Alistair, deux jeunes sœurs rescapées du naufrage du Titanic dans lequel le reste de leur famille a péri, débarquent à New York. Molly, absente, est plongée dans un profond mutisme. Letta doit puiser très loin en elle pour survivre dans cette ville qu'elle n'aime pas. Elle trouve un poste de vendeuse dans la pharmacie-apothicaire C.O. Bigelow.


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Dimanche 14 avril 1912 à 23 h 40 le paquebot Titanic, réputé insubmersible, heurte un iceberg lors de sa traversée inaugurale entre Southampton et New-York. Il coule en moins de 3 heures, entraînant par le fond près de 1500 personnes.

Dans ce naufrage, Letta perd son époux, son frère et ses parents. Seule Molly, son « p’tit chou » sa sœur de 15 ans, échappe au drame, sauvée car elle a pu embarquer sur le dernier canot de sauvetage avec Letta.

Laurence PEYRIN nous raconte l’histoire de ces deux sœurs, sans s’appesantir sur le naufrage en lui même, ce que j’ai apprécié.

Elles débarquent donc à New-York, terrifiées, traumatisées, seules, sans argent, sans vêtements.

Pour ces femmes, initialement destinées à une vie de bonheur simple et sans histoire, l’arrivée en terre promise commence comme un cauchemar.

Mais comment survivre à un tel chagrin ? Alors que Molly souffre d'un choc post-traumatique qui l’enferme dans le silence, Letta se voit contrainte de résister, de se battre pour leur survie, et d’accepter les mains tendues. L'armée du salut, ou l'immigration placent les rescapés qui ne connaissent personne à NY dans un hôtel réquisitionné pour l’occasion. Une des employées va faire engager Letta comme vendeuse en cosmétiques dans une officine, et pensant bien faire, donne du Laudanum à Molly pour qu’elle reste tranquille lorsque sa sœur travaille. Ce laudanum va finir de dévaster le cerveau déjà fragilisé de Molly qui va être internée dans un centre psychiatrique. Aidée de Nathalie, vendeuse dans la même pharmacie et qui a vécu la même chose avec son frère, Letta va devoir se battre pour récupérer sa sœur, tenter de leur bâtir un avenir confortable et sortir de la condition dans laquelle la société veut les enfermer.

Ces femmes affrontent les épreuves avec dignité et combativité. Elles doivent faire face aux journalistes avides de sensationnel, aux commères, aux jalouses et aux diktats de la société new-yorkaise du début du siècle. Pour tenir, pour vivre, pour avoir le droit d’exister en tant que femmes, elles luttent et s’entraident. Ce roman est un hommage aux femmes mais également à l’amour sororal et à l’amitié.

Laurence Peyrin nous dépeint avec précision le New York du début du XXème siècle, nous allons sur Times Square, à Central Park et Greenwich Village. Les buildings, les premières voitures automobiles, la découverte de l’ascenseur, l’aménagement des nombreux parcs, tout est tellement bien décrit que l'on est directement plongés dans cette atmosphère de progrès et de nouveautés.

La société du début du XX è siècle est décrite sans complaisance, l’écart entre les riches et les pauvres, entre les hommes et les femmes, les avancées médicales, le pouvoir de la presse, l’attrait de l’argent, la frivolité, etc..

Elle aborde évidemment de façon très approfondie la perception du deuil, les répercussions d’un tel traumatisme sur des personnes fragiles comme Molly, le combat intérieur pour la reconstruction, la pugnacité, et l’espoir, toujours, celui qui permet de survivre et d’aller de l’avant.

Le rythme est assez lent, et il n’y a que peu de surprises dans cette émouvante histoire, mais l’autrice nous offre des personnages romanesques, lumineux, vibrants d'émotions. Letta, Molly, Nathalie et Jacob sont tous plein d’humanité.

Ce roman plein d’émotions, nous narre la triste mais belle histoire de "la rescapée, l'estropiée, le candide et la muette".


 

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